Vatican: Un ancien nonce aux États-Unis demande la démission du pape François
Dans une lettre de onze pages, rendue publique simultanément aux États-Unis et en Italie, Mgr Carlo Maria Vigano affirme que le pape François était au courant dès 2013 des agissements du cardinal Theodore McCarrick, lourdement sanctionné en juillet par le Vatican.
Les “révélations” de l’archevêque conservateur Carlo Maria Vigano, ancien nonce apostolique à Washington, visant le pape François, sont catégoriquement réfutées par le cardinal Donald Wuerl, archevêque de Washington. D’autres évêques des Etats-Unis prennent leurs distances avec les déclarations de l’ancien nonce.
Carlo Maria Vigano, un prélat italien âgé de 77 ans, accuse le pontife actuel d’avoir sciemment ignoré des avertissements sur le comportement sexuel prédateur du cardinal Theodore McCarrick. Nommé évêque auxiliaire de New York en 1977, ce dernier devient évêque de Metuchen, dans le New Jersey, en 1981, avant d’être nommé archevêque de Newark, dans le même Etat, en 1986. En 2000, il est nommé archevêque de Washington, charge qu’il assume jusqu’au 16 mai 2006 lorsque Mgr Donald Wuerl, évêque de Pittsburgh, lui succède. Il est créé cardinal par Jean Paul II lors du consistoire du 21 février 2001.
L’archevêque Vigano, nonce à Washington entre 2011 et 2016, n’a jamais fourni au cardinal Wuerl des informations sur des sanctions ordonnées par le pape Benoît XVI, à savoir des directives concernant l’archevêque McCarrick, accusé d’abus sexuels sur des mineurs et sur des séminaristes, écrit l’archevêque de Washington sur le site de l’archidiocèse. Il met ainsi en doute le “témoignage” de l’archevêque italien, abondamment répercuté par les milieux conservateurs, comme le site étatsunien LifeSiteNews ou les sites traditionnalistes ou intégristes qui cherchent à saper l’autorité morale du pape François.
Alors que le pape François se rendait au sanctuaire marial de Knock (nord-ouest de l’Irlande), le Saint-Siège n’avait pas encore réagi, dimanche matin 26 août, à une longue diatribe de l’ancien nonce apostolique aux États-Unis, Mgr Carlo Maria Vigano, accusant le pape François d’avoir été informé dès 2013 des agissements du cardinal Theodore McCarrick et de les avoir couverts.
Il demande également au pape actuel de démissionner, ainsi qu’à ses principaux collaborateurs.
Les accusations
Dans ce texte de 11 pages, publié simultanément samedi 25 août dans plusieurs publications catholiques américaines, connues pour leurs positions très conservatrices voire proches des milieux intégristes, ainsi que dans le quotidien italien « La Verita », classé à droite, Mgr Vigano affirme que le pape François avait été informé dès 2013 de sanctions canoniques très strictes que son prédécesseur Benoît XVI aurait imposées au cardinal McCarrick.
Contrairement à celles que le pape allemand avait imposées au cardinal écossais Keith O’Brien, celles-ci n’auraient pas été rendues publiques et François aurait choisi, selon Mgr Vigano qui affirme en avoir personnellement parlé avec lui, de les ignorer, jusqu’aux sanctions imposées le mois dernier.
Le 28 juillet 2018, le Saint-Siège a en effet annoncé que le pape François avait accepté la démission du cardinal McCarrick du collège cardinalice, lui ordonnant, dans le même temps, « la suspension de tout ministère public, avec l’obligation de rester dans une maison (…) pour mener une vie de prière et de repentance jusqu’à ce que les accusations portées contre lui soient examinées dans le cadre d’un procès canonique normal ».
Mgr Vigano affirme que le pape François aurait fait du cardinal McCarrick « son conseiller de confiance ». C’est lui qui l’aurait poussé à promouvoir les cardinaux Blase Cupich, archevêque de Chicago, et Joseph Tobin, archevêque de Newark, deux des bêtes noires des milieux ultra-conservateurs aux États-Unis.
Mgr Vigano met également en cause le Secrétaire d’État, le cardinal Pietro Parolin, et ses prédécesseurs, les cardinaux Angelo Sodano et Tarcisio Bertone. Il les accuse d’avoir enfoui le dossier, avec la complicité des hauts responsables de la Secrétairerie d’État de l’époque, ce qui impliquerait un grand nombre de cardinaux actuels.
Nommé en 2011 nonce aux États-Unis, Mgr Vigano était auparavant secrétaire général du Gouvernorat de l’État de la Cité du Vatican où il s’était attaché à rationaliser les finances du petit État.
Les premiers documents qui avaient fuité dans l’affaire des Vatileaks étaient justement des lettres de Mgr Vigano à Benoît XVI où il expliquait les résistances auxquelles il devait faire face ainsi que son refus d’être nommé nonce aux États-Unis « perçu par tous comme un verdict de condamnation de mon travail, comme une punition ».
« Je le fais pour arrêter la souffrance des victimes et protéger l’Église »
Après sa retraite en 2016, Mgr Vigano s’était rallié aux « dubias », les doutes de quatre cardinaux sur la doctrine exprimée par l’exhortation apostolique Amoris laetitia.
« La principale raison pour laquelle je révèle ces faits maintenant est la situation tragique dans laquelle se trouve l’Église. Je le fais pour arrêter la souffrance des victimes et prévenir de nouvelles victimes et protéger l’Église : seule la vérité peut la libérer », explique-t-il à Life Site News.
Mgr Vigano est lui soupçonné aux États-Unis d’avoir obligé le diocèse de Saint-Paul Minneapolis à enterrer une enquête pour attouchements sur mineurs à l’encontre de son archevêque, Mgr John Nienstedt.
(Avec La Croix)